Interview: Jean-Claude Occo (Occostyle.fr)
Mai 2017, nous attendions ce moment depuis fort longtemps. Nous avions remarqué Jean-Claude Occo à différents congrès de danses latines et de salsa et avions eu pas mal d'échos très positifs à propos de sa pédagogie.
Voici donc notre interview pour découvrir ce professeur hors-du commun alliant pédagogie, partage, bonne humeur et concept innovant.
1. Jean-Claude Occo, peux-tu nous parler de toi et surtout de ton parcours atypique dans le monde de la danse?
Jean-Claude Occo: Je dansais depuis mon plus jeune âge en Guadeloupe, dans les rencontres familiales et autres, avec ma sœur où on reproduisait les chorégraphies des chansons qu'on aimait.
En 1999, après avoir pris un cours de salsa, ça a été le déclic, je voulais exceller dans cette danse. Dès lors, j'ai cherché à me former et me perfectionner aussi bien à Porto Rico, avec Raphael Pion, qu'en France, avec Mouaze Konate, mais surtout Olivier Rio (tout deux venant de Salsabor avec Valérie Michelson et Clifford Jasmin). Grâce au fait que j'enseignais le Tae Kwon Do, aux Antilles, dans une école pluri-disciplinaire, j'ai pu travailler plein de styles de danses afin de maitriser ma danse et trouver mon style (classique, jazz, contemporain, samba, danse orientale, flamenco, danse de salon, …). Afin de m'amuser, j'ai créé ma première compagnie de danse "Cafe con Leche". Elle avait pour but de montrer que la danse et la scène étaient accessibles à tous si on se donnait les moyens en occultant les stéréotypes du physique.
Côté enseignement, je participe à des projets, qui seront de grands défis pédagogiques, pour pouvoir faire danser la salsa aux sourds/malentendants et aveugles/malvoyants.
Par la suite, en 2005, je m'installe en métropole et démarre l'année d'après, durant trois ans, l'école de danse professionnelle de Jazz Rick Odums. Parallèlement à ça, je commence à travailler à Caribailes avec Valérie Mitchelson aussi bien en salsa portoricaine, qu'en salsa cubaine et bachata.
Je décide de remonter une compagnie de danse, en 2010, Arts' Dream Dance Company, qui porte les mêmes valeurs que ma première compagnie aux Antilles. En 2013, nous avons été sacrés "King of Bachata".
A la fermeture de Caribailes en 2011, j'ai décidé de m'associer avec Vaïni et d'être le co-fondateur de Caribbean Fusion. Puis en 2013, je me lance seul en créant Danse Together et montre partout où je suis invité, ma marque, mon état d'esprit, ma vision du partage de la danse, ma pédagogie et musicalité: le Occo Style.
Aujourd'hui encore je continue à développer l'intégration et le bien-être de tous, par la danse.
2. Tu dispenses différents types de cours de danses, peux-tu développer?
Jean-Claude Occo: Comme j'ai pu le dire avant, mes domaines de prédilections sont essentiellement les danses latino-caribéennes.
Je danse et enseigne aussi bien la salsa cubaine, que la salsa portoricaine (style L.A. sur le « 1 » et N.Y, sur le « 2 ») et la bachata.
Je travaille la gestion du corps (isolation, dissociation, synchronisation, gestion dans l'espace, les appuis, le style, …), tout ce qui touche à la scène, les portés et la formation.
La formation que je propose est dans un cadre privé et ne peut faire l'objet de financement par un organisme puisque je n'ai pas l'agrément pour.
Cependant, je propose essentiellement des cours particuliers pour travailler directement sur les envies des personnes si elles en ont, et aussi des cours collectifs.
Je reprends également le projet de vouloir faire danser les danses latino-caribéennes aux sourds/malentendants et aveugles/malvoyants.
De plus je souhaite mettre aussi en avant mon concept de danse TuttiFruti.
3. NY Style, Mambo, cubaine, ton coeur balance, sans doute, mais de quel côté et pourquoi?
Jean-Claude Occo: Au départ, j'étais à fond sur la portoricaine en mode palladium, puis le NY style. L'attitude, la manière d'être, la technique, la rigueur sont des choses qui me parlaient vu mon cursus de danseur. Avec le temps, la cubaine a pris de plus en plus de place car cela me rappelle, à certain moment, les rythmes et danses africaines ou le Gwo Ka (qui est notre part africaine soigneusement cultivée et enracinée dans notre identité culturelle en Guadeloupe).
Aujourd'hui, je suis un vrai ambivalent. Je prends autant de plaisir dans un style que dans l'autre.
Ma priorité est d'arriver à prendre du plaisir en dansant et à en donner 10 fois plus à la personne avec qui je danse.
Comme je le dit, et j'assume, je suis un « sextoy à la demande ». Je m'adapte.
Quand j'invite ou j'accepte de danser avec quelqu'un, il y a la musique. En fonction des sensations quelle me procure, j'ai envie de la retranscrire dans mon corps. Si c'est une musique cubaine, j'ai envie de partir en dansant en cubaine. Si c'est du mambo, en dansant en NY style ou LA. Mais au final, le choix décisif sera ma partenaire. Car il est inconcevable pour moi, de ne pas m'adapter si c'est une chanson mambo et que ma danseuse ne fait que de la cubaine, de ne pas lui donner la possibilité de pouvoir briller ensemble et à l'unisson lors de cette chanson.
4. Nous avons remarqué que tu proposais des cours aux malvoyants/Non voyants, en quoi cela consiste t-il et comment apprendre à quelqu'un qui ne voit pas (ou très peu)?
Les personnes qui ont une déficience visuelle ne voient peut être pas bien ou pas du tout, mais ils sont très sensibles car ils/elles ont développé d'autres facultés et aiguisé d'autres sens. Leur ouie et touché sont remarquables. En donnant des indications verbales claires, ils arrivent à évoluer comme n'importe quelle personne. Puis en donnant des exemples « imagés » sur les sensations voulues et/ou ressenties, on arrive à travailler le style et la qualité du mouvement souhaité.
5. Donc d'après toi, un non voyant/malvoyant peut tout à fait apprendre la salsa/ bachata? Mais comment faire en soirée?
Oui, oui, j'affirme qu'ils peuvent tout à fait apprendre à danser la salsa et la bachata.
Pour les soirées, il y a toujours plusieurs possibilités.
Tout est toujours une question de personne, de caractère et de personnalité.
En règle général, je conseille à tous mes élèves de sortir en groupe pour les aider à prendre confiance en eux et à faciliter leur intégration.
Maintenant, il y a toujours des gens qui sont plus aventuriers et qui n'attendent pas les autres pour agir. Donc voyant ou pas, ils peuvent sortir seuls. Ils auront juste à charge de prévenir leur danseur(euse) de leur particularité. Mais il est vrai que face à des situations inhabituelles, les autres danseurs(euses) qui voient peuvent avoir des craintes, voire des réticences, car cela les sortira de leur zone de confort. C'est bien connu que les gens rejettent plus facilement quand ils ont peur de l'inconnu ou de la différence. Inconsciemment, cela les renvoie intimement à la réalité de leur manque de confiance en eux-mêmes. Beaucoup de danseurs voyants, par exemple, ont du mal à gérer l'espace et ne pas se percuter, alors en rajoutant le facteur de la non visibilité peut les mettre en difficulté.
6. Tu innoves en proposant un concept Tutti-Frutti, ou chacun peut apprendre à guider ou se laisser guider en garçon ou en fille, donc deux filles peuvent à présent danser ensemble, il en va de même pour deux garçons? Comment et où se passent les cours?
Il n'est pas nouveau de voir en soirée salsa des danseurs(euses) d'un certain niveau qui s'amusent à danser ensemble. Mon concept TuttiFrutti n'est pas non plus nouveau dans les formations professionnelles pour l'enseignement des danses de couples.
Je donne juste la possibilité à des personnes lambda de pouvoir soit apprendre directement le rôle qui les intéresse sans aucune discrimination, soit leur permettre d'améliorer leur danse en apprenant les codes du rôle opposé afin de gagner en fluidité et en précision.
7. Tu proposeras de nouveau des workshops durant le plus grand festival d'Europe de danses latines: le Croatian Summer Salsa Festival en 2017, comment as-tu pu intégrer LE plus grand festival au côté des plus grands artistes (Maykel Fonts, Alberto Valdez, Terry & Cecile, SuperMario ou encore Adolfo & Tania)?
J'ai fait, il y a quelques années, la connaissance d'une des organisatrice du festival (Sanda Trintjak). Elle voulait prendre quelques cours particuliers et je ne savais pas du tout qui elle était.
Après un certain temps, j'ai pu aller en Croatie avec elle pour qu'elle me fasse visiter son pays et qu'elle me présente à ses amis et sa famille.
De là, j'ai pu sympathiser avec l'équipe entière des organisateurs du festival qui m'ont invité à découvrir leur festival. Après la première année, j'ai trouvé ce festival magique et l'année d'après, ils m'ont proposé quelques heures de workshops.
Dès lors, ils m'ont fait une proposition chaque année. Sur cette édition 2017, je serai intervenant uniquement sur la partie Sensuel (le Summer Sensual Day du 20 au 26 juin 2017) en tant que défenseur de la bachata dominicaine et festivalier sur la deuxième partie (le Croatian Summer Salsa Festival du 26 juin au 03 juillet).
8. Quel sont tes projets pour 2018?
En 2018, je souhaite développer plusieurs axes.
Dans un premier temps, me recentrer sur moi en tant que performer. Donc c'est la reprise des entrainements et des cours pour m'améliorer et continuer à évoluer.
Dans un second temps, je vais mettre plus l'accent sur l'évènementiel. Je souhaite partir plus régulièrement où on m'appellera pour donner ma vision de la danse dans les associations, les festivals, et autres. Il faut que je vois du coup mon planning avec mon manager qu'il ne faut pas hésiter à contacter soit par mail (bookingoccostyle@gmail.com) soit par téléphone ((+33)7.69.77.59.68).
Dans un troisième temps, je vais donner moins de cours collectifs et je vais privilégier davantage les cours particuliers, afin de favoriser le qualitatif et le développement personnel.
Pour tout le reste, je ne peux pas encore en parler, mais je peux dire que c'est toujours autour de mon amour du partage de la danse. Donc restez connectés sur mon site web, mon facebook et ma chaine youtube et vous verrez bien.
9. Pourrais-tu partager avec nous ton morceau de musique salsa préféré du moment?
Pour être franc, je tourne autour de 2 chansons actuellement.
En Cubaine, La Charanga Habanera – El Ricky Ricon
En Mambo, La Maxima 79 – Descarga Chango
10. Pour finir sur une note "technique", tu nous montres une petite passe de bachata dominicaine à la sauce Occo?
Nous tenons à remercier chaleureusement Monsieur Occo pour cette interview exclusive, nous avons pu en apprendre plus sur sa philosophie de la danse, ses motivations et nous avons pu nous abreuver de son énergie du quotidien.
Nous lui souhaitons donc une excellente continuation.
Michel - Administrateur et créateur de www.salsa-guide.fr